Les Zones ignorées

 

Tu ne marches pas tu creuses, tournes et retournes sur ta langue des mots vieillis, retrouves au hasard des rues des endroits qui ressemblent à ceux qui t’ont amené là. Tu prends des virages à répétition comme on tourne un mot dans sa bouche jusqu’à l’user pour qu’il perde son sens, qu’il devienne étranger, vide tout à fait, écorcé de sa peau de souvenirs. 



Un homme déambule dans une ville et voit plus qu’il n’observe. Murs, maisons, rues, perspectives défilent en un long travelling visuel et sensoriel qui nous plonge au plus profond des surfaces familières de la ville, des matières, des flux, mécaniques ou humains, qui l’habitent. Dans ce flot incessant, un seul point de vue, celui du personnage que l’on sent à l’abandon et pour qui l’errance semble la seule attache au monde. Les images de Gilles Balmet jouent entre le microscopique et le satellitaire, entre processus et expressivité, mais peut-être ne sont-elle faites que de matière picturale, brute et intense pour dire autrement cette parabole qui pointe l’inhumanité de notre société et des villes qui en sont l’incarnation. Éditions du Chemin de Fer, 2010